Angela Schanelec, réalisatrice de « Music » : « Le mythe d’Œdipe me sert à créer un film »
Si le cinéma allemand brille dans les grands festivals, comme ce fut le cas lors de la dernière Berlinale, une place à part doit être faite à Angela Schanelec, née en 1962. Formée au Théâtre Thalia de Hambourg, puis à la Schaubühne de Berlin, l’actrice, réalisatrice et scénariste est l’une des figures les plus libres de sa génération, traçant son sillon depuis une trentaine d’années – le festival de cinéma de Marseille, le FID, lui avait rendu un hommage en 2020.
Music, son dixième long-métrage à la splendeur elliptique, librement adapté du mythe d’Œdipe, avec Aliocha Schneider et Agathe Bonitzer, arrive donc en salle après avoir été récompensé à la Berlinale (Prix du scénario). A Berlin, devant une limonade au concombre, nous avons rencontré la cinéaste à l’allure stricte et à la voix enfantine, comme sortie d’un conte. D’emblée, elle insiste : il est préférable d’entrer dans Music en laissant de côté le mythe, lequel n’est qu’un prétexte pour inventer un film.
Son Œdipe contemporain se prénomme Jon (Aliocha Schneider). On sait très peu de choses sur lui, si ce n’est qu’il a grandi au sein d’une famille aimante, sans connaître ses véritables parents. En tuant involontairement un homme qui voulait l’embrasser, Jon se retrouve en prison, où il rencontre une surveillante, Iro (Agathe Bonitzer), dont il tombe amoureux. S’il perd la vue, Jon va trouver de nouvelles perspectives grâce à la passion de la musique que lui transmet Iro, laquelle est aussi sa mère.
Dans les premières minutes de « Music », vous filmez d’abord le paysage en plan large, les personnages s’y incrustant ensuite comme des êtres minuscules. Pourquoi ce choix ?
L’enjeu central du film, et de mes longs-métrages précédents, comme J’étais à la maison, mais… (2019), c’est comment les personnages apparaissent dans le paysage. C’est particulièrement visible dans Music, tourné en partie en Grèce, où les territoires arides sont quasi vierges et montrent la nature à l’état pur. Il y a les pierres, les montagnes, et le vide autour. Et ce paysage a un impact sur l’apparition des protagonistes. Les montagnes nous donnent aussi la possibilité de les filmer d’en haut. Il est donc passionnant de voir comment le paysage et les montagnes ont une influence sur le déroulement du récit. Comment quelqu’un apparaît, puis disparaît…
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